Il était une fois dans un pays baigné de soleil, un jardin. Ne le cherchez pas dans un guide touristique, seuls vos pas sauront vous y conduire.

Après avoir franchit son haut portail de fer savamment ouvragé, il vous faudra déposer vos chaussures et votre sac à dos. Le jardin se visite pieds nus et sans bagage. Point de cailloux pour cheminer dans ses allées, le sol est fait de tomettes rouges patinées par le temps. Nul risque de s’égarer, le chemin est bordé de murets crépis de blanc et incrustés d’une discrète frise de mosaïque bleue et jaune d’or.

Pas d’herbe folle, juste la terre battue, ocre et sèche où poussent de somptueux rosiers, des roses blanches, du jasmin, des clématites à l’assaut du ciel, des orangers et bien d’autres essences fleuries et odorantes. Chaque allée se termine par un pavillon blanc aux larges ouvertures où flottent de transparents voilages. Rosiers et jasmins s’emmêlent et s’enlacent autour de leurs piliers, formant comme une seule plante brillante et parfumée.

Les allées et les kiosques, vus du ciel, représentent la Croix Touareg, en hommage à ce peuple libre, noble et fier. Peut-être remarquerez-vous qu’il n’est point de pétale au sol, nulle feuille jaunie qui pourraient ternir le vert fastueux de la végétation. Des fontaines çà et là au croisement des chemins, diffusent le doux murmure du clapotis de l’eau. Chaque kiosque est ouvert à une brise légère qui fait danser les voilages et laisse apparaître aux yeux du visiteur, la large perspective sur le paysage.

Le jardin est sur un promontoire, permettant ainsi une vue à 360° sur la nature environnante. Ici des falaises de roches rouges, qui dominent une vallée luxuriante où croissent des figuiers gorgés de figues sucrées. Là, des femmes aux habits colorés qui lavent leur linge dans les eaux claires du ruisseau. On entend leurs chants et leurs rires comme des cascades de bonne humeur.

Alors, si vous reprenez votre balade, vous pourriez faire une halte et déguster un thé à la menthe, sucré et parfumé, confortablement installé sur de moelleux coussins, profitant de la vue et du calme du lieu.

J’aime à déambuler dans mon jardin, sentir mes pieds sur les tomettes chaudes de soleil, humer le doux parfum des orangers en fleurs. Peut-être m’y verrez-vous, ne vous effrayez pas, marche tout contre moi une lionne tranquille. Je calque mon pas sur le sien, calme, nonchalant. Rien d’autre à faire que de sentir la brise tiède dans mes cheveux, le contact soyeux de mes vêtements amples en respirant les parfums alentours. Quelques fois, nos pas nous guident vers un kiosque à l’abri des regards. La végétation en cet endroit semble avoir repris ses droits. La lionne se couche alors aux pieds d’une statue de pierre. Femme ? enfant ? Je ne sais pas encore. Elle est recouverte de mousse. Ici, lianes et lierres masquent la vue des grands arches. Il y règne une lumière douce et apaisante. Je m’amuse à dégager son fin visage et son corps petit à petit, sous le regard tranquille de mon amie la lionne, j’ai tout le temps.

Puis, je pousse la petite porte de fer rouillée. J’accède ainsi au bel escalier de métal en colimaçon, qui descend jusqu’à la plaine. J’aime à sentir sous mes doigts sa rampe métallique, admirer le savant enchevêtrement de métal, habilement travaillé par le ferronnier du village.

Et quand mes pieds touchent l’herbe tendre et humide de la rosée du matin, je me dirige vers le ruisseau. Je m’assied à l’ombre d’un figuier. J’entend le chant des femmes qui s’activent.

Et je laisse le temps s’écouler lentement comme une invitation au repos.